Quand nous avons emmené Arthur à la montagne pour la première fois, il avait huit mois. Qu’avions nous fait là ! Un mini poussin à presque 2000 m d’altitude à l'Alpe d'Huez ! Il paraît que la montagne n’est pas faite pour les petits enfants. Il ne s’en est pas porté plus mal, bien qu’étant revenu couvert d’eczema ; rien à voir, c’était l’omelette. Depuis, il y est retourné, encore et encore, parce que nous aimons la montagne ; j’étais aux premières loges pour admirer la découverte du ski par Arthur – puis par Hadrien.

La première sensation de glisse doit être surprenante pour le tout petit enfant. Pris de court, surpris dans son rapport au sol, il entre en cataplexie et s’affaisse. Un réflexe de survie, sans doute. Après quelques essais, dix minutes par ci, une descente par là, ça y est. Il comprend, il apprend, il n’a plus peur. Et puis il a re-peur. Finalement non, il n’a plus peur. Ah si. Ah non. Bref.

D’un coup, il est assez grand pour être inscrit au club Pioupiou de l’ESF, cet enclos aménagé pour les mini skieurs, où des petits trop choux font du chasse neige sur des skis modèle réduit. Deux heures par jour pour commencer, parce qu’il risquerait de se fatiguer trop. Soudain il faut trois heures. Soudain il a son pioupiou, soudain il a son ourson, à la faveur d’une vraie quinzaine en montagne. Il n’a pas quatre ans.

Et je suis fière, parce que c’est chouette quand même, cet enfant qui chausse à peine sorti du chalet, pour descendre les lacets du chemin du Petit Alaska en riant, ses médailles de général épinglées sur le torse. Fière, mais saisie. Le club Pioupiou, tant attendu, c’est déjà fini. L’an prochain mon microscopique champion s’élancera sur les pistes « pour de vrai » avec ceux du flocon. S’il reste deux semaines, il passera sa première étoile dans la foulée. Il en rêve, de sa première étoile. C’est super, les étoiles. D’ailleurs, il voulait commencer par la troisième étoile, rapport au nombre. S’il continue comme ça, il l’aura à cinq ans : ça va.

Pendant ce temps là, le suivant pousse derrière, pour faire comme son frère. Il est passé par la case bébé en peau de mouton, et celle de la découverte émerveillée de la neige, mais je sens bien que ça aussi, c’est déjà fini. Il a fallu lui trouver les plus petites chaussures du magasin, et des skis de 67 cm de long. Le mettre dessus, bien sûr, et le voir s’écrouler sur lui-même comme ils font tous au début. Fondre de tendresse, se promener de long en large en le tenant par les mains. Se souvenir qu’il n’a pas deux ans. Et alors quoi, l’an prochain le pioupiou ? L’ourson ? À deux ans. Le vertige, donc.

Je ne sais pas vous, mais je sens que je ne vais pas skier mieux qu’eux très longtemps.

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